(Article) L'histoire du vigneronnage dans le Beaujolais

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(Article) L'histoire du vigneronnage dans le Beaujolais

Le terme « vigneronnage » vient du mot bourguignon « vaingneron » et de l'ancien verbe « viner » qi signifiait cultiver la vigne. Le vigneronnage est un système d'exploitation viticole se rapprochant du métayage. Il se différencie de ce dernier dans la mesure où le viticulteur ne paie pas de loyer mais fournit seulement sa force de travail. En contrepartie, le propriétaire assume l'intégralité des dépenses liées à l'exploitation agricole. Les deux parties se partagent ensuite par moitié égale la récolte de raisins. Ce mode d'exploitation de la vigne est spécifique au Beaujolais, au Mâconnais, au Chalonnais et à la côte de Beaune. Il est inconnu dans le reste de la France.

Au XIXème siècle, dans le Beaujolais, le système de culture est encore basé sur le principe du « vingeronnage ». Ce système ancien, hérité du Moyen Age, se fonde sur l'association entre un propriétaire foncier, détenteur du capital, possédant les bâtiments d'habitation, d'exploitation, le matériel viticole et un travailleur agricole responsable de l'entretien des cultures et de la pérennité du domaine. Les contrats de « vigneronnage » sont généralement de courte durée, jusqu'à neuf années, mais ils sont reconduits tacitement. Ainsi, les « vigneronnages » se transmettent généralement de père en fils, ce qui crée un certain attachement des vignerons à la terre qu'ils exploitent comme s'ils étaient propriétaires. Cette forme particulière de contrat assure une certaine stabilité.

Le « vigneronnage » beaujolais se compose généralement de trois hectares de vignes, d'un hectare de pré et d'un hectare de terre labourable. Au XIXème siècle, la polyculture est la principale forme d'agriculture dans le Beaujolais. Les produits agricoles ne sont pas réservés à la vente et servent principalement à la subsistance du vigneron et de sa famille. Le vigneron doit donc entretenir des prés et des terres labourables pour l'alimentation des siens ainsi que des bêtes de trait et des animaux de basse-cour qui demeurent à sa charge. Certains « vigneronnages » peuvent être plus étendus mais la règle veut que la vigne y occupe la majeure partie du sol.

Le propriétaire est responsable de toutes les dépenses liées à l'entretien des bâtiments, du matériel et des biens fonciers. D'un point de vue juridique, le vigneron peut être considéré comme un ouvrier agricole, même si son statut est plus élevé que celui des gagés ou des journaliers...Le vigneron loue sa force de travail mais n'a pas les mêmes rapports avec son patron que les autres ouvriers agricoles dans la mesure où il est associé personnellement à la réussite de l'entreprise viticole. Au début du XXème siècle, François Myard évoquait le « vigneronnage » en ces termes : « il n'est pas question de subordination mais plutôt d'une complémentarité dans l'intérêt de chacun. Ils sont associés dans un but précis : la production des récoltes qu'ils partagent. Tout est fait pour développer chez le vigneron un esprit d'initiative et une politique du rendement, faisant de lui plus un demi-propriétaire qu'un ouvrier ». Malgré tout le « vigneronnage » n'est ni une société, ni un contrat de louage traditionnel mais plutôt un type de contrat bien particulier qui est bien souvent en défaveur du vigneron.

Le vigneron jouit d'une grande indépendance dans la conduite de l'exploitation viticole mais également dans le recrutement des ouvriers agricoles. Parfois, cependant, les « vigneronnages » sont supervisés par des régisseurs, directement au service des propriétaires. Après la crise phylloxérique, cette indépendance du vigneron s'accroît. Les nouveaux grands propriétaires fonciers du Beaujolais ont besoin d'une force de travail considérable pour reconstituer les vignobles que seuls les vignerons peuvent leur offrir dans des conditions intéressantes. A l'aube du XXème siècle, le vigneron renégocie donc les règles des contrats de « vigneronnage » en sa faveur et obtient la disparition de certaines tâches rappelant le système féodal. Il devient propriétaire du cheptel et, la spécialisation viticole du Beaujolais entreprise à la suite du phylloxéra lui assure des revenus moyens plus élevés. Le vigneron commence à gagner une réelle indépendance et une certaine prospérité au début du XXème siècle. Des progrès qui ne cessent de s'amplifier tout au long du siècle.

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